reportage chez un artisan menuisier

Depuis toujours, j’ai une passion pour les ouvriers, les artisans, ces métiers qui ont le génie du geste, la patience, les savoir-faire. Cela vient peut-être de ma formation (CAP Tourneur Fraiseur) ou de mon côté bricoleur raté et impatient, allez savoir.

Lorsque je croise dans un mariage Nadine et Thierry Leprêtre, gérants d’une entreprise de menuiserie, on oublie rapidement les banalités sur la qualité du traiteur, ou la beauté du domaine pour dévier rapidement sur leur spécialité de créateur d’escaliers, le bois, l’atelier, les outils.

Leur fille Camille a une oreille qui traîne lorsque je leur parle à son papa de mon plaisir de photographier les artisans, leurs attitudes, mais surtout leurs gestes et leurs mains.

En aparté, elle m’explique que ses parents partent bientôt à la retraite mais à son grand dam elle n’a pas de photos de son papa au travail dans son atelier.

L’idée germe alors rapidement d’organiser un shooting dans l’atelier pour réaliser quelques photos avant leur départ à la retraite.

Le rendez-vous est donc pris dans l’atelier de la menuiserie Leprettre, non loin du Havre, trois jours avant la cessation d’activité de Thierry et Nadine pour un reportage photo qui, je le sais, sera riche en émotion.

Je vais passer une demi-journée avec Thierry. C’est le minimum pour mettre à l’aise un artisan discret qui passe son temps le nez dans les copeaux de bois, et qui n’a pas l’habitude d’être mis en avant et encore moins d’être suivi par un photographe.

Je le sais, comme à chaque fois, les dix premières minutes de reportage sont ratées d’ailleurs je l’annonce toujours à mes sujets. Je le sais, il y a le stress, l’inquiétude, le manque de naturel, et les questions récurrentes qu’est ce que je dois faire ? Où je me mets ?

Pour faire redescendre cette petite pression du début de séance, j’ai la solution : faire parler mes sujets, échanger avec eux sur leurs spécialités là ou ils sont à l’aise et ça marche parfaitement avec Thierry. Il est insatiable sur son métier, ses outils, ses matériaux. En même temps qu’il parle, la pression retombe, ses gestes se fluidifient et retrouvent leur grâce.

Thierry et Nadine n’arrêtent pas leur entreprise, ils la transmettent. C’est Mathieu, leur collaborateur depuis plusieurs années qui reprend le flambeau. Et lorsque j’échange avec eux et Camille, je comprends l’importance de ce détail et de mettre en avant la complicité créée ces dernières années .